Le rendez-vous était fixé à la sortie du métro Etienne Marcel, nous sommes 32 à répondre présents. Nous rencontrons Hervé Benhamou, conférencier de l’agence Flashguide.
Sur la place, il nous retrace l’histoire du Paris du Moyen Age et plus précisément celle du quartier, étroitement associée à celle d’Etienne Marcel.
Etienne Marcel
Depuis décembre 1355, il est le prévôt des marchands, de fait maire de la Ville. Ainsi, il contrôle la vie économique de Paris et peut peser sur le pouvoir royal qui siège à Paris. Il est élu comme député du Tiers Etat aux Etats Généraux de 1355 et 1356. Profitant de la défaite française à Poitiers et de la détention du roi Jean le Bon en Angleterre, il tente d’imposer au dauphin Charles, futur Charles V, les grandes ordonnances de 1337. Ces ordonnances visaient à faire contrôler les impôts royaux par les Etats Généraux. Devant le refus du Dauphin, il tente de soulever le peuple de Paris. Etienne Marcel crée alors une milice bourgeoise dont les membres portent un chaperon rouge et bleu aux couleurs de Paris. En janvier 1358, des parisiens envahissent le palais royal, deux conseillers du Dauphin sont assassinés en sa présence, il est obligé d’accepter les ordonnances. Au cours d’une bousculade en 1358, Etienne Marcel sera assassiné devant la Porte Saint Antoine.
Vers 1110, Louis VI le Gros décide un transfert, en rase campagne sur l’emplacement d’anciens marécages asséchés d’où le nom de Champeaux (un restaurant des Halles porte encore ce nom), des halles. A l’emplacement actuel de la fontaine des Innocents existait un cimetière. En 1187, Philippe Auguste fait bâtir un mur de séparation avec les Halles voisines. Il faudra attendre 1780 pour que ce cimetière et ses nombreuses fosses communes soient fermés pour des raisons sanitaires évidentes et les ossements transportés dans les catacombes, rue de la Tombe-Issoire.
La troupe se dirige ensuite vers la tour Jean sans Peur. Dernier élément du palais parisien des Ducs de Bourgogne, la plus haute tour civile médiévale de Paris a conservé : son grand escalier d’apparat, le décor végétal de sa voûte d’escalier et les plus anciennes latrines de Paris au confort exceptionnel que nous n’avons pas pu voir, le monument étant fermé au public le mardi. Seule une partie de l’enceinte de Philippe Auguste était visible. Notre guide nous raconte la vie de Jean sans Peur, duc de Bourgogne de 1371 à 1419, date de son assassinat.
En sortant de ce monument classé, nous entreprenons un long périple de presque 3 heures. Nous revenons rue Etienne Marcel, puis empruntons le boulevard Sébastopol, pour entrer dans ce petit passage de l’Ancre que beaucoup d’entre nous connaissent grâce à Josette, notamment la boutique Pep’s du réparateur de parapluie.
Rue St Martin, Hervé Benhamou évoque l’église St Martin des Champs déjà découverte lors de la visite des Arts et Métiers. Dans la rue de Montmorency, au numéro 51 se trouve la maison d’aumône de Nicolas Flamel, la plus vieille maison de Paris. A cette occasion, notre conférencier nous parle de cet homme exceptionnel, alchimiste à la recherche de la pierre philosophale qui permet de changer le plomb en or et aussi charitable. En effet la maison accueillait des indigents à la seule condition qu’ils prient chaque jour, comme l’épitaphe du fronton l’indique : « Nous homes et femes laboureurs demourans ou proche de ceste maison qui fut faite en l’an de grâce mil quatre cens et sept somes tenus chascun endroit soy dire tous les jours un paternostre et un ave maria en priant Dieu que sa grâce face pardon aus povres pescheurs trepasses. Amen ».
Au 3 rue Volta, nous nous arrêtons devant le pastiche d’une maison médiévale bâtie par un bourgeois au 17e siècle, pas moyenâgeuse du tout !
Au 39 rue de Bretagne, nous déambulons dans le marché des Enfants Rouges créé en 1615. C’est le plus vieux marché couvert de Paris, toujours en activité. Petite anecdote, à la terrasse d’un café, Hervé Benhamou rencontre le cinéaste Arnaud Desplechin et le présente au groupe.
Rue des Archives, plusieurs découvertes étonnantes nous attendent : au 24, nous entrons dans le cloitre des Billettes, rattaché à l’église protestante unie de France. Edifiée en 1294, l’église des Billettes était à l’origine une chapelle destinée à honorer un miracle. Une hostie aurait été profanée par le juif Jonathas qui l’aurait entaillée au couteau. Elle aurait alors saigné. Puis, jetée dans l’eau bouillante, elle se serait envolée. Jonathas fut condamné à mort et brûlé. En 1405, la communauté des Billettes fait reconstruire une église et en 1427, y ajoute un cimetière et un cloitre. C’est le seul cloître du Moyen Age qui subsiste à Paris.
Au 58, nous admirons les vestiges de l’Hôtel Clisson. En 1371, Olivier de Clisson, connétable de France construit un hôtel particulier sur un terrain à l’extérieur des remparts de Philippe Auguste. L’édifice n’a conservé que la porte fortifiée avec ses tourelles en encorbellement coiffées en poivrières.
Au bout de la rue des Archives, nous traversons la rue de Rivoli pour emprunter la rue François Miron, petit coup d’œil à la boutique Izraël qui regorge d’épices du monde entier. Un regard sur les maisons à colombage au 11 et au 13 : les colombages datent du Moyen Age et sont visibles grâce à des travaux de restauration effectués dans les années 1970. On y voit également les enseignes du « Faucheur » et du « Mouton ». Mais l’apothéose de cette balade médiévale se trouve assurément au 44 de la rue dans la maison d’Ourscamp. Nous visitons par groupe de 15, à tour de rôle, le premier étage, une cour à colombage et le cellier en sous-sol.
Le cellier date du XIIIe siècle et est l’un des rares témoignages de l’architecture médiévale à Paris. C’est en 1248 que les moines cisterciens de l’Abbaye d’Ourscamp dans l’Oise reçoivent en donation un terrain situé entre les rues François Miron et Geoffroy L’Asnier. Certaines ont visité cette abbaye, lors d’une excursion de trois jours à Senlis et Noyon en 2008, organisée par Pierre Mathieu. La maison primitive était occupée par les moines qui stockaient dans le cellier la marchandise produite dans leur abbaye et la revendaient aux Parisiens. Le projet, conçu par un architecte des monuments historiques, consiste à restaurer le cellier d’une superficie de 200 m2 : réfection des voûtes d’ogives, des murs, du sol et la création de nouveaux accès – l’escalier actuel est particulièrement raide. Mais l’association de sauvegarde peine à rassembler les fonds nécessaires à la restauration .
En sortant de ce magnifique endroit, nous nous dirigeons rue de Jouy, au croisement avec la rue de Fourcy, Hervé Benhamou attire notre attention sur le bas-relief datant du Moyen Age.
Au croisement des rues Charlemagne et du Figuier, notre guide rappelle l’origine du nom de cette voie : la légende veut que Marguerite de Valois ait fait couper un figuier planté devant la porte de son hôtel qui gênait le passage de son carrosse. Au bout de la rue, nous apercevons l’hôtel de Sens où nous avons vu plusieurs expositions, notamment « le gaz à tous les étages », notre guide renonce donc à y aller. Plus loin, nous admirons la rue du Prévôt pour son étroitesse, c’est pour cette raison qu’elle était nommée au Moyen Age sous le nom de rue Percée, le nom gravé dans la pierre est toujours visible.
La rue Charlemagne, embouteillage, la sortie des collégiens et des lycéens du lycée éponyme rend notre progression difficile vers la rue des jardins St Paul. Nous arrivons à l’enceinte de Philippe Auguste, ultime étape de notre périple. Le vestige le plus important se trouve donc rue des jardins St Paul. Avant son départ en croisade en 1190, Philippe Auguste pour protéger la capitale ordonne de la clore d’une muraille. Ledit tronçon s’étend sur 120 m environ et mesure 6 à 7 m de haut et 3 m d’épaisseur. Le quart de la tour Montgomery ainsi que les vestiges d’une autre tour ont été restaurées. Cette partie de la muraille n’a été rénovée qu’en 1998. Aujourd’hui, le terrain la longeant est utilisé comme terrain de sports par le Lycée Charlemagne.
Nous nous séparons vers 17h30, fourbus mais satisfaits de cette visite riche en monuments exceptionnels.