Visite de la Galerie Dorée de la Banque de France – Samedi 15 avril 2023

Nous retrouvons devant le 2, rue Radziwill, Stéphane Carré, conférencier bénévole de l’association « Paris
historique ». Nous sommes 20 de l’AMICAF et 10 personnes d’un autre groupe. Il nous entraine à la
découverte de la plus belle réalisation de l’art rocaille qui n’a rien à envier à la galerie des glaces de Versailles ou la Galerie d’Apollon du Louvre.
Après être passés par les portiques de sécurité et avoir présenté nos cartes d’identité, nous arrivons au
premier étage dans une petite antichambre de la Galerie dorée où se trouve une maquette de l’Hôtel de
Toulouse et un portrait en pied du comte de Toulouse.


L’histoire commence sur des terrains libérés par la démolition de l’ancienne enceinte Charles V. Louis
Phélypaux de la Vrillière, secrétaire d’état de Louis XIII et collectionneur d’art, demande à François Mansart de lui construire un hôtel. En 1713, Louis Alexandre de Bourbon, comte de Toulouse et bâtard légitimé de Louis XIV, achète l’hôtel de la Vrillière et la demeure prend le nom d’hôtel de Toulouse. Entre 1714 et 1719, il fait redécorer la galerie par l’architecte Robert de Cotte et le sculpteur François Antoine Vassé.
En 1793 à la mort du Duc de Penthièvre, fils du comte de Toulouse, l’hôtel est confisqué comme bien
national. La Galerie sert alors d’entrepôt à l’imprimerie nationale. Elle subit altérations et vandalismes : les
tableaux sont envoyés dans différents musées, d’autres sont découpés. Le monogramme du comte de
Toulouse est brûlé. Heureusement les boiseries sont épargnées.
Napoléon Bonaparte achète l’hôtel et crée la Banque de France en 1802. Le 17 janvier 1810, se tient la
première assemblée générale des actionnaires. L’hôtel est à nouveau modifié à partir du milieu du XIXe siècle lorsque la Banque de France charge l’architecte Gabriel Crétin d’un projet d’extension du siège rendu indispensable par le développement de l’activité bancaire.
Tout au long du XIXe siècle, l’état de la Galerie se détériore. Un rapport de 1858 suggère de la raser mais
Charles le Bègue de Germiny, gouverneur de la Banque de France à cette époque, s’y oppose. Entre 1870 et 1876, la Galerie est démontée et remontée par Charles Questel. Trop dégradées les fresques de François Perrier ne peuvent être sauvées. Elles sont reproduites sur toiles marouflées réalisées de 1865 à 1869 par Paul et Raymond Balze et les frères Denuelle.
La galerie retrouve sa fonction d’accueil des assemblées générales des actionnaires de la Banque : elles s’y tiendront jusqu’à la nationalisation de l’établissement en 1936.


Une énième restauration débute en septembre 2014, la réfection s’achève en juillet 2015. La Galerie rouvre à nouveau au public, sous le regard attentif de Don Quichotte et Sancho Pança…
Dès l’entrée, on est émerveillé par l’ensemble, mais chaque élément mérite d’être détaillé.
Comme une petite sœur de la Galerie des Glaces de Versailles, la Galerie dorée s’élance sur 40 mètres de
long pour 8 de haut et 6,5 mètres de large.


Outre l’aspect clinquant qui frappe à première vue, la galerie attire l’œil par le plafond, et plus précisément par sa superbe voute qui, de l’entrée à la cheminée, est peinte d’une immense fresque réalisée par François Perrier. Cette composition majestueuse mélange d’histoire et de mythologie : si le tableau central représente la guerre dacique des romains, les quatre autres mettent en scène le feu, l’eau, l’air et la terre par les figures de Jupiter, de Neptune ou encore d’Éole. Perrier a voulu créer un parallèle entre mythologie et royauté : chacune de ces scènes sont en fait intimement liées à des évènements réels ayant marqué le
règne de Louis XIII notamment.
1 – Le Feu : Jupiter, armé de son foudre, vient rendre visite à Sémélé, fille du roi de Thèbes. La jeune femme
périt brûlée à la vue du dieu. Elle attend un enfant, que Zeus retira du ventre de sa mère, et qu’il mit dans sa cuisse : Dionysos, né de la cuisse de Jupiter.


Jupiter et Sémélé
2 – La Terre : Enlèvement de Proserpine par Pluton, dieu des Ténèbres. Il est accompagné de son char au
cheval noir et tient sa fourche. Il emporte la jeune femme dans les profondeurs de la terre; elle y passera 6
mois qui correspondent à l’Automne et l’Hiver, elle reviendra sur terre auprès de sa mère Déméter ou Cérès
pendant les 6 mois suivants, soit le Printemps et l’Eté.


Pluton et Proserpine
3 – L’Eau : Neptune et Amphitrite. Le dieu est sur son char mené par des chevaux aux pieds palmés.
Amphitrite est une néréide dont il tombe amoureux et qu’il épouse.


Neptune et Amphitrite
4 – L’Air : Junon avec son paon. Ici, elle prie Eole, dieu des vents, de déchaîner les tempêtes pour empêcher
la victoire des Troyens.


Eole et Junon
Sur les flancs de la galerie, on retrouve également dix tableaux achetés par Louis Phélyppeaux de la
Vrillière représentant des pans de l’histoire romaine et grecque. Les motifs au pied des cadres sont aussi des œuvres d’art.


Neptune                                                                                                Enlèvement d’Europe 
Majestueuse du fait de ses fresques, la galerie l’est tout autant par les décors, ornements et boiseries qui la
composent. Au fil du temps, de nombreux travaux de décoration ont été successivement entrepris avant de donner à la Galerie dorée l’aspect qu’on lui connait aujourd’hui.


Enfin, pour habiller les extrémités de la galerie, ce sont les iconographies de la navigation et de la chasse qui ont été choisies. On retrouve un trophée de Leucothée, déesse protectrice des navigateurs au-dessus de la cheminée et, lui faisant face, un trophée de Diane chasseresse à l’autre extrémité. Tous ces attributs, reflétés par six imposants miroirs, donnent une impression d’infini à l’ensemble.


Sous le bâtiment moderne de la Banque de France, à 27 mètres sous terre se trouvent les réserves d’or de
la France. Le stock de 2 435 tonnes est entreposé dans une cave blindée d’un hectare : La Souterraine.
La Souterraine se situe à plus de dix mètres au-dessous du niveau de la Seine au sein d’une poche de calcaire dur et fut construite entre 1924 et 1927 : sa construction fut décidée au lendemain de la guerre de 14-18 qui avait révélé la vulnérabilité des caves de l’hôtel de Toulouse. Elle fut creusée en galerie par 1 200 ouvriers qui se relayèrent nuit et jour pendant 3 ans. Elle est soutenue par 720 piliers et protégée par de multiples enceintes.


Nous terminons la visite en passant devant les portraits des directeurs qui se sont succédé aux commandes de la Banque, dont celui de Jean Claude Trichet, gouverneur de 1993 à 2003, qui a dirigé la mise en place de l’euro.
Une visite insolite qu’il ne fallait pas manquer…
Texte : Nadine Frelat
Photos : Nadine Frelat et Christiane Bruneau