Exposition Berthe Morisot & le XVIIIe siècle – Mardi 30 janvier 2024

La jauge imposée par le musée Marmottan-Monet étant fixé à 15 personnes, la formation de deux groupes s’est imposée au vu des 39 inscriptions. Odile Déchelotte conduira successivement les deux groupes. Lors de l’entrée du second, les groupes se sont se sont croisés, le premier ayant pris le temps de visiter la collection permanente et de faire quelques emplettes à la librairie du musée.

1er groupe

2e groupe

Notre conférencière nous présente l’artiste. Berthe Morisot nait à Bourges en 1841 dans une famille très cultivée qui encourage sa vocation de peintre. L’exposition nous fera découvrir les œuvres de celle qui fut l’élève de Corot, la muse de Manet (avant son mariage avec Eugène, le frère d’Edouard) et la première femme impressionniste, membre du groupe, que Degas invitera à participer à la première exposition impressionniste en 1874. Elle sera la seule femme à signer de son nom de jeune fille. De son union avec Eugène Manet naitra une fille, Julie. L’artiste meurt à Paris en1895 à l’âge de 54 ans.

Parmi les 65 tableaux exposés, des œuvres de Berthe Morisot évidemment mais également celles de ceux qui l’ont inspirée provenant de musées français et étrangers et de collections particulières réunies pour la première fois. L’exposition permettra également de mettre en lumière les liens qui l’unissent aux peintres du XVIIIe siècle.

L’exposition se déroule dans les très petites pièces de l’ancien hôtel particulier de Paul Marmottan. Dans la première, est accroché le portrait en pied de Tiburce Morisot, père de Berthe, représenté dans son habit de préfet (Cher) par le peintre Léonard Georges.

Les salles suivantes sont consacrées aux peintures de Berthe Morisot et à d’autres artistes comme Degas, Pissarro, Monet, Renoir, Sisley, Reynolds, Gainsborough…

Impossible de tout commenter, un choix s’impose.

Jeune femme en tenue de bal de Berthe Morisot

Odile attire notre attention sur le tour de cou de la jeune femme, elle précise que ce collier a remplacé les bijoux que beaucoup de femmes avaient vendus pour contribuer à l’effort de guerre en 1870. D’autres accessoires en vogue comme la fleur accrochée au corsage ou l’éventail figurent sur de nombreux tableaux.

Portrait de Berthe Morisot par Marcello

Sur ce portrait, l’artiste, appuyée sur une chaise, semble nous regarder intensément. Il est réalisé par Marcello, pseudonyme d’Adèle d’Affry, peintre et amie de Berthe Morisot.

Portrait de Louise Riesener par Berthe Morisot

Il s’agit là du portrait de Louise, fille du peintre Léon Riesener, précurseur de l’impressionnisme. Elle arbore à la ceinture une rose.

Si les peintres impressionnistes privilégient la nature, Berthe Morisot s’attache plus à la représentation de l’humain comme le démontrent les tableaux suivants :

Jeune fille en tenue de bal (1), Jeune fille au divan (2), Femme à sa toilette (3), Jeune femme en gris, étendue (4), Petites filles au jardin (5).

1                                                                             2

3                                                                                                       4

5

Dans le dernier tableau   » les petites filles au jardin  » (5), nous sommes sensibles à la délicatesse des couleurs et à la fluidité du pinceau de Berthe Morisot qui reflètent bien son appartenance au mouvement impressionniste. Les nuances évoquent la fraicheur du jardin tandis que la chaise en osier ajoute une touche de rusticité.

Suivre le fil conducteur de l’exposition, c’est mettre en lumière les liens qui unissent Berthe Morisot aux maitres du XVIIIe comme Watteau, Boucher, Fragonard, Perronneau, Nattier. Ainsi quelques tableaux de celle-ci sont exposés côte à côte avec ceux de ces peintres, pour mieux évoquer la connivence qui existent entre eux :

Jeune femme debout en pied, vue de dos (Fragonard), Apollon révélant sa divinité à la bergère Issé (Boucher), Portrait d’une femme au divan (Perronneau), Mrs Mary Robinson (Romney),

 

Morisot                                                                             Fragonard 

Morisot                                                                          Boucher

Morisot                                                                                                                   Perronneau                                         

Morisot                                                                                       Romney             

Odile Déchelotte attire notre attention sur le tableau de George Romney intitulé « Mrs Mary Robinson », femme de l’aristocratie portant un manchon blanc dont Morisot s’inspira pour peindre « Femme avec un manchon ou hiver » dont nous ne pourrons voir qu’une photo, l’original  déjà décroché est reparti à Dallas. Elle nous raconte que pour se réchauffer les mains, certaines femmes de la haute bourgeoisie glissaient un petit chien dans leur manchon !!!

Berthe Morisot, initiée au pastel dès son plus jeune âge par son professeur Geoffroy Chocarne, puis Imprégnée de l’art de ses prédécesseurs, elle multiplie l’usage du pastel et a recours à cette technique surtout dans les dessins préparatoires mais aussi pour peindre sa fille Julie, son modèle préféré et modèle très disponible.

En 1892, Eugène Manet décède, Julie en ressent un profond chagrin, palpable dans le tableau « Julie avec son lévrier ».

Berthe Morisot aime représenter la nature sans artifice comme le jardin de Bougival. Nous admirons la liberté de touche et de couleur, sa capacité à saisir l’atmosphère du moment, ici, l’exubérance de la végétation.

Rose Trémière                                                      Jardin à Bougival                  

Les époux Manet aimaient beaucoup se rendre en Angleterre et surtout sur l’Ile de Wight, destination de leur voyage de noces. Une salle regorge de toiles de peintres britanniques émanant de la collection de Sir Wallace.

Eugène Manet sur l’ile de Wight

Dans la dernière, un trompe-l’œil représentant le salon des Manet mais où est accroché le tableau, « la bergère couchée » peint par Berthe Morisot.

Dans cette même salle, nous apprenons que Berthe Morisot n’est pas l’arrière petite nièce de Jean-Honoré Fragonard. Lors de l’ouverture de l’exposition en octobre 2023, des généalogistes annoncent qu’il n’existe aucune filiation entre les deux familles mais pourrait-on dire une filiation choisie, tant elle l’admirait …

Pour conclure, Berthe Morisot est l’artiste qui intègre les considérations du XVIIIe siècle à sa pratique sans pour autant renoncer à la modernité de son époque. Elle peut tout peindre, tout esquisser avec une transparence inégalée que l’on trouve aussi bien dans ses pastels que dans ses huiles.

La visite s’achève… Une exposition captivante.

Sur les conseils de notre conférencière, nous passons par le sous-sol admirer la collection permanente – quelques nymphéas – et le fameux « Impression, soleil levant », puis passage obligé par la boutique.

Texte : Danielle Echenique & Denise Meunier – Photos : Christiane Bruneau & Jocelyne Poulizac