Exposition Frida Kahlo – Au-delà des apparences – Vendredi 21 octobre 2022

Nous nous retrouvons devant le Palais Galliera connu comme étant le musée de la Mode de la ville de Paris. Celui-ci met en lumière actuellement et, jusqu’au 5 mars 2023, Frida Kahlo, une des artistes du XXème siècle la plus reconnue et la plus influente.

Pour accéder au musée, notre groupe de 18 personnes traverse la cour d’honneur pavée et bordée d’un péristyle en hémicycle.

Nous pénétrons dans le musée à la suite d’Odile Déchelotte, notre conférencière, puis nous patientons quelques minutes… il faut récupérer les billets, les distribuer, les reprendre pour les scanner et les restituer à chacun… Enfin, nous sommes prêts à nous transporter au Mexique et à plonger dans l’intimité de Frida Kahlo (06/07/1907-13/07/1954).

Avant de nous engager dans la galerie courbe au rez-de-jardin, Odile introduit sa conférence en nous expliquant comment Frida Kahlo a transformé en force créative le drame survenu lorsqu’elle avait 18 ans et qui l’a rendue infirme, son mariage houleux avec l’artiste Diego Rivera et son impossibilité à devenir mère.

Frida Kahlo a peint 143 tableaux dont 55 autoportraits mais l’exposition ne met pas en avant ses peintures, les tableaux se font rares. L’exposition rassemble 200 objets et costumes ayant appartenu à Frida Kahlo. Ils proviennent de la mythique Casa Azul, la maison où Frida Kahlo est née et a grandi. Photographies, vêtements, bijoux, prothèses médicales, tous ces objets ont été mis sous scellés à sa mort en 1954 par son mari Diego Rivera. Oubliés, ils n’ont été redécouverts seulement qu’en 2004.

L’exposition est divisée en sept sections disposées de façon chronologique.

La première partie retrace l’enfance et l’adolescence de Magdalena Carmen Frida Kahlo y Calderón, née le 6 juillet 1907.

Nous découvrons son arbre généalogique : sa mère d’origine espagnole et indigène lui transmet le goût pour les vêtements traditionnels, son père émigré allemand devient photographe pour le gouvernement mexicain. Il réalise de nombreux portraits de Frida qui apprend très jeune à prendre la pose.

 

Plusieurs événements ont marqué sa vie. A l’âge de six ans, elle contracte la poliomyélite et à dix-huit ans, elle est victime d’un accident de bus. Obligée de garder le lit pendant des mois et à abandonner ses études de médecine, elle commence à peindre. « Je ne suis pas morte et j’ai une raison de vivre. Cette raison, c’est la peinture. » a-t-elle déclaré.

Avec les années, Frida Kahlo a inventé un personnage, elle est passée par plusieurs étapes, jeune elle s’habille en garçon, le personnage Mexicana arrive au moment où elle quitte le Mexique pour les États-Unis reliant ainsi son mode de vie et son art à son ascendance métisse, en réaction à son divorce, elle opte à nouveau pour le costume et coupe ses cheveux courts.

 

Puis, nous observons un tirage de Victor Reyes de son premier mariage en août 1929 à propos duquel elle dira « J’ai eu deux accidents graves dans ma vie, l’un à cause d’un bus, l’autre ce fut Diego. Diego fut de loin le pire. » C’est le début d’une histoire d’amour tumultueuse, après avoir divorcé en 1939, ils se remarient en 1940 à San Francisco.

Elle entre au Parti communiste mexicain en 1928. Elle veut changer les choses, renverser les codes sociaux et réduire les inégalités. Elle se lance également dans une lutte pour les droits des femmes.

   

Avec l’évocation de la Casa Azul, nous découvrons l’endroit où Frida Kahlo est née, a vécu et y est morte en 1954.

C’est en 1930 que le couple rénove la maison familiale en repeignant les murs en bleu éclatant. Ils la remplissent d’objets dédiés à l’art populaire mexicain comme les sculptures préhispaniques et les peintures votives.

La Casa Azul devient très vite un véritable centre culturel qui attire des personnalités parmi lesquelles André Breton et Léon Trotski qu’elle hébergera deux ans lors de son exil politique.

 

Frida Kahlo avec ses chiens                 peinture votive en remerciement à la Sainte-Trinité après un accident de voiture entre 1920 et 1930 (huile sur métal)                                                               

Dans les années 1930, nous suivons Frida Kahlo à travers ses voyages aux Etats-Unis qu’elle surnomme « Gringolandia » en passant par San Francisco, Détroit puis New-York.

Diego Rivera a reçu des commandes de peintures murales dans ces trois villes et Frida qui n’est pas encore connue à l’étranger, elle l’accompagne.

À San Francisco, pendant que Diego Rivera réalise des fresques murales, elle façonne son style Tehuana : « Les gringas m’adorent, elles remarquent toutes les robes et les rebozos que j’ai apportés avec moi, elles sont bouche bée devant mes colliers de jade et tous les peintres veulent que je pose pour eux ».

A Détroit, à la suite de sa fausse couche, elle peint une anti-nativité depuis son lit d’hôpital en rupture avec les autoportraits de belle Tehuana.

L’hôpital Henri Ford ou le Lit Volant 1932

Lors d’événements mondains ou vernissages, Frida Kahlo séduit les photographes de renom d’importants magazines Vogue US, Vanity Fair qui capturent son style si particulier comme Nickolas Murray.

A New-York, le galeriste Julien Lévy pris de passion pour ses coiffures et après l’avoir photographiée dans l’intimité en train de se tresser les cheveux, décide d’organiser sa première exposition personnelle en novembre 1938.

 Survivant, huile sur métal 1938.

 Frida représente un guerrier préhistorique jouant à la pelote. La peinture est présentée dans son cadre d’origine en étain d’Oaxaca. En novembre 1938, la critique du New Yorker suggéra que le tableau dépeignait « La survie du Mexique dans un monde fragile »

 Photo prise par Frida Kahlo et Nickolas Muray avec un retardateur  « Réunion à San Angel » 1938

Après New-York, Frida est invitée à Paris en 1939 par André Breton pour exposer son travail. Lorsqu’elle arrive, rien n’est prêt. Finalement, la Galerie Renou et Colle organisera une exposition collective intitulée « Mexique » où seront présentées dix-huit de ses œuvres. Frida est accueillie chaleureusement par de nombreux artistes de renom, présents au vernissage, tels que Joan Miró, Kandinsky, Picasso…

La même année, l’Etat français fait l’acquisition pour 1000 francs anciens d’un autoportrait de Frida Kahlo, première acquisition d’une artiste mexicaine conservé, habituellement, au musée d’art moderne du Centre Pompidou. Dans cet autoportrait sans complaisance, le visage de l’artiste apparaît libéré des stéréotypes féminins imposés par la société. Elle se représente avec sa fameuse coiffe, son rouge à lèvres et son monosourcil.

 The Frame

Depuis l’enfance, l’univers médical fait partie du quotidien de Frida Kahlo et s’inscrit dans son œuvre. L’accident qui aurait pu lui coûter la vie a entraîné un long suivi médical et de nombreuses opérations. On regarde avec émotion les corsets portés par Frida Kahlo et appareils médicaux décorés et transformés en œuvres d’art.

 

La Colonne brisée 1944                                      Prothèse de jambe avec botte en cuir et soie brodée de motifs chinois.

      Frida Kahlo soulevant son pull pour dévoiler son corset peint

Cet autoportrait plein de douleur représente l’artiste à une époque où sa santé se dégrade fortement.

À la sortie de la galerie, les couleurs jaillissent sur les vêtements portés par Frida Kahlo.

Après son accident, elle adopte l’huipil, une tenue Tehuana, corsage traditionnel d’Amérique centrale qui lui permet d’affirmer sa mexicanité et de composer avec son handicap. De coupe carrée, l’huipil est une tunique fabriquée en coton ou en soie enrichie par des broderies géométriques ou florales. Celles-ci sont souvent réalisées à la main ou avec une machine à coudre à pédale Singer. L’Huipil est suffisamment large pour couvrir ses corsets orthopédiques. En complément, elle porte une longue jupe sur un jupon blanc à volant pour dissimuler sa claudication : « Il me faut des jupes longues, maintenant que ma jambe malade est devenue si laide » écrivait-elle. Est souvent associé à la tenue, le « rebozo » (châle tissé) drapé sur les épaules ou couvrant la tête auquel elle coordonne les fleurs dans ses cheveux, son rouge à lèvres et son vernis à ongles.

 

A la présentation de ces robes s’ajoutent des auto portraits et photographies pour lesquelles l’artiste a posé.

La visite se prolonge dans le Salon d’honneur du Palais Galliera par une exposition-capsule abordant l’influence de l’artiste sur la mode contemporaine. Nous découvrons des créations haute couture inspirées de sa vie et de ses œuvres signées par de grands couturiers de Jean-Paul Gaultier à Maria Grazia Chiuri pour Dior, d’Alexander McQueen à Karl Lagerfeld pour Chanel.

Artiste douée, femme extraordinaire et influente qui a transformé sa vie à travers l’art, Frida Kahlo est un exemple pour ceux qui pensent que les femmes ou les personnes handicapées ne sont pas capables de grandes choses.

Texte de Joëlle Egret & photos de Joëlle Egret et de Christiane Bruneau

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